EPE : Ascenseur pour l’échafaud , l’enseignement supérieur a la tête sur le billot

Contre toute attente, le PIA3* ayant été honni pendant la précédente campagne, les opposant·e·s farouches aux financements par projets se sont rendu compte, une fois élu·e·s, qu’il fallait des projets, et des PIA qui plus est. Le premier dépôt d’un projet PIA sur les transitions fut un échec. Mais la persévérance est une vertu et finit toujours par être récompensée. Il faut dire qu’entre temps une bonne fée s’était penchée sur le berceau et avait soufflé une nouvelle ligne, gage de succès. Madame la rectrice orientait donc notre politique de recherche en “suggérant” de mettre toute la communauté en ordre de bataille autour des Industries Culturelles et Créatives (ICC)… pour in fine offrir une nouvelle structuration de site. Le projet MIRANDA était né (ou presque…) et avec lui celui d’un EPE (Établissement Public Expérimental) appelé à structurer le site. Cheval de Troie – ou cavalier législatif dans un autre contexte -, le PIA4 désormais béni engageait notre université et sa communauté “à l’insu de son plein gré” sur la voie sans retour du nec plus ultra en matière de néo-libéralisation des universités et de l’enseignement supérieur et de la recherche.

À l’horizon, un tout petit grand établissement appelé à survivre au mieux, à végéter sans doute, à l’ombre de son grand frère l’UM dont il partage désormais le nom, comme dans toute bonne famille : Université de Montpellier Paul Valéry. Et tout cela, sous le regard reconnaissant et attendri du big brother ministériel qui n’en espérait peut-être pas tant et en attendra sans doute encore davantage !

Qui trouve-t-on dans ce ménage à trois ?

  • Une université LLA-SHS qui compte plus de 20000 étudiants et qui conservera le  même nombre de sièges au sein du conseil d’administration de l’EPE.
  • L’école d’architecture de Montpellier (ENSAM) de 800 étudiants (donc moins que la plus petite UFR de l’UPVM) qui disposera d’un siège au conseil d’administration de l’EPE.
  • Le CIMM (Centre International de Musique Médiévale), association Loi 1901 sans étudiants inscrits en son sein, qui disposera également d’un siège au conseil d’administration de l’EPE.

Comment va fonctionner cet attelage ?

L’ENSAM et le CIMM participeront aux décisions de notre communauté ainsi d’ailleurs que le représentant de la DRAC (Direction Régionale des Affaires Culturelles). Il s’agit donc, pour l’instant, de trois “extérieurs” supplémentaires (portant le poids des membres du CA non élus à 30%) jusqu’à ce que d’autres établissements composantes soient intégrés à l’EPE et disposent chacun d’un siège… Les décisions engageant la plus importante des composantes (notre future ancienne université) seront donc prises par un fort pourcentage d’extérieurs aux mains de la présidence, quelle qu’elle soit. Dévitalisation du fonctionnement démocratique des conseils et hyperprésidentialisation, plus que jamais au menu! 

Vous en voulez encore? Alors ne ratez pas l’article 38 des statuts de l’EPE.

On peut y découvrir l’existence du Comité d’orientation stratégique international de l’Établissement Public Expérimental. Il est composé de la présidence, des vice-présidences institutionnelles et de la vice-présidence déléguée aux relations internationales, des présidences ou directions des établissements composantes, des directions du CIRAD, CNRS, INRAE, INRAP, IRD, de quatre personnalités scientifiques internationales, des présidences de la région Occitanie, de la métropole de Montpellier, de l’agglomération de Béziers, de trois personnalités issues du monde socio-économique, artistique et culturel. Et pour faire bonne mesure, les représentants des établissements associés (le MO.CO, l’École Nationale Supérieure d’Art Dramatique, l’Institut Chorégraphique International) sont également membres de ce comité alors même qu’ils ne font pas partie intégrante de l’EPE. Or, ce comité, qui est réuni au moins une fois par an, est appelé à se prononcer sur la stratégie de l’UMPV pour l’ensemble de ses missions. Il doit contribuer, enfin, à sa mise en œuvre et est appelé à examiner les projets présentant une importance stratégique particulière.

Cela dit, ayez confiance, rien ne change…

Si, pour l’heure, les statuts de l’EPE font encore référence au code de l’éducation, rien ne garantit que cela restera le cas. Les EPE et les Grands établissements sont justement des statuts conçus par le ministère pour s’affranchir “des contraintes” du code de l’éducation. 

Mode de gouvernance, établissements composantes, profil du président ou celui des extérieurs, libéralisation des droits d’inscription, tout est possible…

Quel est notre destin face à l’autre, pour le coup, très grand établissement du site ?
Grossir ou périr.

  • Grossir, c’est-à-dire, intégrer de nouveaux établissements composantes, éventuellement privés et à caractère lucratif, puisque tout l’autorise. Comment ne pas craindre que l’essence même de l’université et sa mission de service public, les principes et les valeurs humanistes qu’elle contribue à défendre au sein de la société soient dévoyés? 
  • Périr, autrement dit, être absorbé, tous ensemble, par l’UM (il suffira de supprimer “Paul-Valéry”), à l’invitation du ministère, nos statuts étant désormais compatibles. 

Dans les deux hypothèses, ironie du sort, les deux plus importantes décisions de Madame la Présidente auront été de ne pas fusionner… puis de préparer la fusion

Au regard de ces enjeux, de ces risques, des inquiétudes qu’ils suscitent, nous demanderons sans tarder à la communauté universitaire de se prononcer, par voie de référendum, sur l’avenir qu’elle souhaite dans ou hors d’un grand établissement. 

Le groupe Renouvelons les Énergies

* pour mémoire les Programmes d’Investissement d’Avenir ont été lancés en 2009 et nous en sommes à la 4e vague